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Gabriel Serville
Question N° 28402 au Ministère de l’agriculture


Question soumise le 14 avril 2020

M. Gabriel Serville attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les mesures d'adaptation de la politique commune de la pêche proposées par la Commission européenne. En effet, malgré l'alerte continue des professionnels de la pêche ultramarins, la proposition de la Commission récemment adoptée par le Collège des commissaires modifiant le FEAMP ne prend aucunement en compte la situation de la filière pêche des régions ultrapériphériques de l'Union (RUP). La mesure continentale d'aide au stockage serait inapplicable dans les RUP françaises parce que la liste des espèces éligibles ne tient pas compte des espèces pêchées dans les régions tropicales et que ces régions ne disposent pas d'organisations reconnues au niveau communautaire. Pire, même si les professionnels des RUP françaises étaient rendus éligibles à la mesure continentale, celle-ci ne correspond en rien aux besoins et aux contraintes spécifiques à l'organisation de ces régions, qui bénéficient pour cette raison d'un dispositif adapté dans le FEAMP, les plans de compensation des surcoûts. Cette position de la Commission provoque un sentiment d'abandon et d'injustice dans ces territoires, qui paient pourtant eux aussi un lourd tribut sanitaire et économique à la lutte contre le coronavirus. Ce sentiment d'injustice est renforcé par le fait que les RUP représentent plus de 10 % de la zone économique exclusive de l'Union européenne, et que sur les 19 millions de kilomètres carrés de la ZEE européenne, seuls 5,2 millions relèvent de l'Europe continentale. La place des RUP devrait donc être au cœur des politiques communautaires en matière d'économie bleue, ce qui n'est malheureusement pas le cas s'agissant des mesures d'urgence décidées par la Commission en matière de pêche. Certes, la crise impose l'urgence. Toutefois l'urgence ne peut pas justifier de laisser la pêche des RUP de côté, c'est-à-dire les pêcheurs et les industries, les salariés et leurs familles, comme si, contrairement au continent, la crise actuelle ne les avait pas impactés. Aussi, au regard de ce qui précède, et afin de garantir la sécurité alimentaire des populations d'outre-mer dans un contexte d'incertitudes sur l'avitaillement aérien et maritime en raison des risques liés au covid-19, il faut mettre en place dans les RUP un outil de soutien qui permette de pêcher afin d'approvisionner le marché local. Il s'agit tout simplement de tirer les conséquences du fait que les RUP, situées à des milliers de kilomètres du continent européen, sont obligées par la crise actuelle de compter sur leurs propres ressources pour assurer la sécurité alimentaire de leurs populations. À cette fin, il faut permettre à l'atelier de transformation premier acheteur d'acheter le poisson au prix de marché avant crise, afin que les pêcheurs continuent à partir en mer et ainsi que le marché local soit correctement approvisionné. Rappelons que dans les RUP, il n'y a pas de possibilité de dégager les « trop-pleins » de pêche en frais sur des départements voisins, voire sur des pays des alentours, comme c'est le cas sur le continent européen. Il n'y a pas non plus de possibilité de faire venir aisément du poisson d'autres départements ou régions d'Europe dans le contexte actuel. La seule régulation locale possible est donc la surgélation par l'atelier de transformation. Il résulte de tout ceci que, afin d'éviter la ruine de cette activité qui contribue à garantir la sécurité alimentaire des RUP en matière de pêche, tout autant que pour garantir l'approvisionnement de ces territoires en poissons frais dans un contexte de grande tension sur l'aérien et le maritime, la Commission doit autoriser une mesure permettant de garantir aux pêcheurs qu'ils pourront écouler le produit de leur pêche dans de bonnes conditions et de préserver l'équilibre financier de l'atelier de transformation, qui doit faire face à la réduction de débouchés consécutif au confinement des populations. Aussi, il lui demande s'il compte appuyer les demandes des organisations représentatives des filières pêches ultramarines, afin que la proposition de la Commission soit amendée pour assurer la pérennité de la pêche outre-mer.

Réponse émise le 13 octobre 2020

L'objectif du Gouvernement a été dès le début de la crise de maintenir opérationnels les différents maillons de la filière pêche. C'est ainsi que la pêche a été le premier secteur d'activité à bénéficier d'un dispositif spécifique, qui vient en complément de l'indispensable activation des dispositifs horizontaux auxquels la filière a accès en tant que de besoin (https://www.economie.gouv.fr/files/files/2020/coronavirus_faq_entreprises.pdf). C'est un signal très fort. La base de ce plan de soutien est la réaction très rapide de la Commission européenne et l'engagement, dans lequel la France a largement pris sa part, de tous les États membres au Conseil et au Parlement. Cela a permis de faire aboutir le règlement (UE) 2020/560 du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2020, qui institue des mesures spécifiques pour le secteur de la pêche et de l'aquaculture et permet notamment dans ces circonstances exceptionnelles d'activer les arrêts temporaires. Le régime d'arrêt temporaire sur la base de la mesure 33 du fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche a été adapté pour les outre-mers afin de prendre en compte les spécificités de la pêche ultra-marine. La Commission a également accepté pour les régions ultrapériphériques la possibilité de mettre en place une aide compensatoire des pertes économiques liées à la crise (aux coûts accrus de stockage, à la dépréciation du prix du poisson…) dans le cadre du régime de compensation des surcoûts déjà en place. Les modalités de mise en œuvre, définies après discussions avec les collectivités concernées, sont actuellement en cours d'adoption. Enfin, au niveau national, le Gouvernement a amélioré les mesures transversales en revalorisant l'activité partielle spécifiquement pour la pêche. Ainsi : - la grande majorité des professionnels de la mer (pêcheurs, aquaculteurs, mareyeurs et acteurs de la commercialisation) sont pleinement éligibles à tous les dispositifs horizontaux : activité partielle, dispositifs de soutien à la trésorerie, fonds de solidarité, report de charges fiscales et sociales, report d'échéances de crédits ; - le dispositif de l'activité partielle a été fortement et exceptionnellement revalorisé par le Gouvernement. Une ordonnance sociale, adoptée en conseil des ministres et ses textes d'application publiés début mai, permettent d'appliquer pleinement à la filière pêche cette revalorisation. C'est un geste fort de la solidarité nationale. Dans un souci permanent de transparence et d'information, le ministère de l'agriculture et de l'alimentation a mis en place sur son site un certain nombre d'outils à destination des secteurs agricoles, alimentaires et de la pêche permettant de suivre ces évolutions auxquels se référer. Ils sont consultables à l'adresse suivante : https://agriculture.gouv.fr/covid-19-informations-sur-les-secteurs-du-ministere-de-lagriculture-et-de-lalimentation. Le ministère chargé de l'agriculture reste pleinement mobilisé pour suivre l'évolution de la situation pour l'ensemble des filières agricoles et alimentaires afin d'assurer la mise en œuvre de ces dispositifs dans les meilleures conditions possibles pour les entreprises concernées.

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