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Bruno Nestor Azerot
Question N° 1775 au Ministère des armées


Question soumise le 10 octobre 2017

M. Bruno Nestor Azerot rappelle à Mme la ministre des armées que les forces armées sont engagées sur quatre théâtres d'opération importants : au sud, au Sahel et au Levant, elles sont confrontées à des ennemis dotés d'armes sophistiquées ; à l'est, elles doivent déployer à titre de précaution toute la gamme des armes conventionnelles ; sur le territoire national, elles doivent renforcer leur présence par un maillage sécuritaire ; enfin outre-mer, elles doivent assurer un pré-positionnement significatif pouvant répondre à des interventions humanitaires ou de sécurité publique souvent liées aux catastrophes naturelles. Face à ces différentes situations, les armées doivent monter en puissance, aussi bien humaine que matérielle. Or si des efforts indéniables sont effectués, il faut bien reconnaître que deux tiers des équipements et un tiers des hommes manquent. Notamment, pour l'armée de terre, une bonne partie de des matériels ont plus de 40 ans, et seulement 30 % de ces derniers sont opérationnels. Sur 2 700 VAB ainsi, seuls 300 sont en état de partir en opération, un fusil d'assaut sur deux n'est pas équipé de l'optique de nuit. Pour la marine, l'absence d'un second porte-avions ou de navires de type « batral » réduit singulièrement la capacité d'intervention. La modernisation des matériels devient donc urgente, comme le développement d'une industrie de pointe en mesure de répondre aux enjeux à venir. La compétence est là puisque l'on a pu observer lors de la bataille de Mossoul l'efficacité du canon Cesar qui a fait l'admiration des forces alliées combattantes sur le terrain par sa mobilité, sa précision et sa puissance. Cependant, les livraisons de l'ensemble des matériels ont pris d'énormes retards, notamment en munitions. Certains armements qui devaient être livrés en 2015 ne le seront qu'en 2019. Il lui demande en conséquence ce qu'il compte faire pour accélérer la modernisation des armées et la sécurisation des personnels.

Réponse émise le 12 décembre 2017

Comme l'a rappelé la ministre des armées dans son avant-propos à la revue stratégique de défense et de sécurité nationale qui a été remise officiellement au Président de la République le 13 octobre 2017, les menaces et les risques identifiés dans le Livre blanc de 2013 se sont manifestés de façon plus rapide et intense que prévu. Par leur simultanéité, leur complexité et leur dispersion géographique, les opérations et les missions dans lesquelles les armées françaises sont engagées mettent leurs capacités et leurs ressources sous forte tension. Tout en garantissant la permanence et la sûreté de la dissuasion nucléaire, elles sont notamment déployées au Sahel dans un cadre national, intégrées au Levant dans une coalition internationale, et participent en parallèle à la réassurance de nos alliés sur le flanc Est de l'Europe. Elles contribuent dans le même temps aux mesures de défense et de protection du territoire national (opération Sentinelle) et de ses approches. Cet engagement des armées, au-delà du contrat opérationnel qui leur a été fixé, s'exerce sur des théâtres particulièrement contraignants. Il provoque logiquement une usure prématurée de certains équipements. L'armée de terre parvient à pallier ces difficultés en prolongeant la durée de vie d'une partie de ses matériels, comme par exemple celle des véhicules de l'avant blindé (VAB). Parallèlement, des efforts significatifs ont d'ores et déjà été engagés pour la modernisation, notamment, des systèmes sol-air, des hélicoptères légers et pour l'acquisition de moyens de détection et de neutralisation de la menace RAM (roquettes, artillerie et mortiers), ainsi que de véhicules blindés protégés et connectés (JAGUAR, GRIFFON, VBMR légers) et de divers armements de petit calibre dont l'arme individuelle future (AIF). Ces efforts de modernisation contribuent indéniablement au renforcement de la sécurisation des militaires engagés sur le terrain. En matière de combat terrestre, le programme SCORPION, qui a pour objectif de renforcer l'aptitude opérationnelle des forces au contact ou dans la profondeur tactique et de contrôler le milieu dans la durée, permettra par ailleurs d'augmenter la puissance et l'agilité des unités engagées. Pour ce qui concerne les moyens aériens, le décalage des livraisons de Rafale, décidé en 2013, a conduit l'armée de l'air à prolonger sa flotte de Mirage 2000-5 et de Mirage 2000 D, respectivement jusqu'en 2025 et 2032, pour respecter son niveau d'ambition opérationnelle. La livraison programmée de certains matériels dans les prochaines années devrait toutefois progressivement conduire à la régénération des capacités. Ainsi, l'arrivée du standard Rafale F3R et des deux premiers avions de ravitaillement en vol MRTT (Multi-Role Transport Tanker), à l'horizon 2019, permettra de combler une partie du déficit capacitaire de l'armée de l'air. Huit avions de transport tactique C130 Hercules devraient également être modernisés entre 2019 et 2023 pour répondre aux besoins des forces spéciales. S'agissant de la marine nationale, la présence à la mer d'un groupe aéronaval est aujourd'hui liée à la disponibilité d'un porte-avions unique. La permanence à la mer d'une formation de ce type a vocation à s'inscrire dans le cadre de la constitution d'une force intégrée franco-britannique, prévue par les traités de Lancaster House (2010), avec en particulier l'arrivée dans les prochaines années d'une capacité de porte-aéronefs britannique. La relation de défense franco-britannique s'est en effet encore renforcée avec les traités précités dans les domaines opérationnel, capacitaire, industriel et nucléaire. L'enjeu pour la France reste bien, en dépit du Brexit, d'ancrer le Royaume-Uni dans une coopération bilatérale de défense structurante dans tous les domaines, et ainsi de maintenir une relation de défense privilégiée avec le seul autre pays européen toujours doté d'ambitions globales, de la capacité de mener des opérations de haute intensité et d'une dissuasion nucléaire. Par ailleurs, la protection de nos approches maritimes et de nos intérêts en mer requiert, ponctuellement, des capacités pour faire face à des menaces comme le terrorisme maritime ou les tentatives d'incursion dans nos eaux territoriales. Elle nécessite impérativement un effort particulier dans les équipements permettant d'intervenir dans le cadre de la défense maritime du territoire et de l'action de l'État en mer, notamment dans les DROM-COM. A cet égard, il est précisé que des travaux sont actuellement menés en vue d'envisager la livraison dès 2021, au lieu de 2025, des premiers patrouilleurs de type BATSIMAR (bâtiments de surveillance et d'intervention maritime) permettant ainsi d'éviter et, à tout le moins, de réduire significativement les ruptures temporaires de capacité. Enfin, comme le souligne l'honorable parlementaire, le développement d'une industrie de pointe est essentielle pour répondre aux enjeux de défense. Il est rappelé que la France jouit d'un statut de grande puissance technologique grâce à une base industrielle et technologique de défense solide, qui rassemble une dizaine de grands groupes, plus de 4 000 PME et s'appuie sur 200 000 emplois répartis sur le territoire. Sa vitalité garantit aux armées un accès pérenne à des équipements du meilleur niveau. L'entretien d'une ambition industrielle et technologique élevée constitue donc un enjeu de souveraineté et un pilier de notre autonomie stratégique. Plus généralement, la préservation d'un modèle d'armée complet et équilibré est indispensable pour assurer à la France son indépendance nationale, son autonomie stratégique et sa liberté d'action. Ce modèle doit disposer de l'ensemble des aptitudes et des capacités nécessaires pour atteindre les effets militaires recherchés dans un contexte opérationnel toujours plus exigeant. Afin de répondre à ces multiples enjeux, les conclusions de la revue stratégique de défense et de sécurité nationale seront déclinées, en termes capacitaires et budgétaires, dans la prochaine loi de programmation militaire (LPM). La modernisation des équipements et l'intensification du maintien en condition opérationnelle bénéficieront à cet égard du renforcement des moyens financiers alloués au ministère. En effet, le Président de la République a décidé, d'ores et déjà, d'augmenter le budget des armées de 1,8 milliard d'euros pour 2018, cette hausse étant amenée à se prolonger chaque année à hauteur de 1,7 milliard d'euros jusqu'en 2022. Au-delà, la LPM permettra d'atteindre l'objectif visant à porter le budget des armées à 2 % du PIB en 2025, conformément à la décision du chef de l'État.

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