Intervention de Mathieu Gallet

Réunion du mercredi 26 juillet 2017 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Mathieu Gallet, président-directeur général de Radio France :

Je vais commencer par répondre à cette question, qui me tient à coeur. J'ai été le premier à regretter que nos orchestres ne tournent pas assez « en région », comme on dit. Lorsque j'étais étudiant, l'Orchestre national de France donnait tous les ans un concert à Mérignac, autrement dit dans la banlieue de Bordeaux.

Les faits sont là : transporter et loger cent musiciens accompagnés de techniciens a un coût. Sans révéler de secret, je peux vous dire que nous travaillons actuellement avec un opérateur de transport ferroviaire à un partenariat effectif dès la saison 2017-2018. Il nous permettra de transporter orchestres et équipes techniques sans avoir à supporter tous les coûts. Les destinations seront choisies en fonction de l'existence d'une salle à l'acoustique suffisante pour accueillir un orchestre symphonique. Nous avons pensé à des villes comme Dijon, Rennes, Aix-en-Provence mais aussi Albi ou Amiens.

Nous recherchons des partenariats pour le logement et discutons avec un opérateur hôtelier.

Michel Orier, directeur de la musique et de la création culturelle, qui a été dans une vie antérieure directeur de la maison de la culture d'Amiens et de celle de Grenoble, est lui aussi très sensible à ces questions.

Je ne vous promets pas, monsieur Larive, que nos orchestres viendront jusqu'en Ariège mais sachez que nous veillerons à les faire tourner chaque saison. Cet objectif fait partie des missions confiées à Emmanuel Krivine, qui prendra ses fonctions de directeur musical de l'Orchestre national de France au mois de septembre. J'espère que nous serons en mesure l'année prochaine de dresser un meilleur bilan en ce domaine.

Les voies d'amélioration passent aussi par le numérique. Nous allons lancer une nouvelle offre à la fin de l'année sur France Musique avec la captation en direct de tous les concerts de l'Auditorium. Cela permettra un élargissement à de nouveaux publics, notamment en milieu scolaire. La retransmission dans les classes sera l'occasion d'expliquer ce qu'est un orchestre symphonique et de décrypter son fonctionnement.

Je ne reviendrai pas sur les divers regrets que vous avez exprimés les uns et les autres. Notre rôle est aussi de renouveler les talents de la Maison de la radio. Emilie Aubry, qui officie sur La Chaîne parlementaire et sur Arte, va reprendre la tranche occupée par L'Esprit public : elle saura, j'en suis sûr, estomper le souvenir de Philippe Meyer.

J'en viens au rapprochement entre sociétés de l'audiovisuel public.

Commençons par Franceinfo. Il y a peu de domaines du secteur public où quatre entreprises aient su, dans des délais aussi courts, s'accorder sur un projet, en s'attachant avant tout à l'offre nouvelle qu'il apporte. Ma conviction, partagée par Delphine Ernotte, était que l'absence du service public sur le créneau de l'information en continu était une anomalie. C'était un cas unique en Europe mais je n'appesantirai pas sur les raisons de cette exception. Je rappellerai seulement que le projet d'une chaîne publique d'information en continu a été abandonné par le Gouvernement en 2002.

Par rapport aux trois chaînes privées existantes, il fallait se singulariser en offrant aux téléspectateurs la possibilité de se donner le temps du recul. C'est cela peut-être qui perturbe le public : l'écriture est moins télévisuelle que numérique ; elle laisse la place à des modules plus longs. Je suis très fier de voir à quel point l'actualité ultramarine est présente, au contraire de BFM, de LCI ou de CNews. Autre apport à souligner : les archives de l'INA, qui permettent de donner un éclairage historique à l'actualité.

La chaîne va fêter son premier anniversaire le 1er septembre. Elle a évolué depuis sa création et elle évoluera encore à la rentrée. Nous pouvons nous satisfaire des succès enregistrés sur le support numérique et sur le support radiophonique – les craintes d'un phagocytage de la télévision n'avaient pas lieu d'être. Il reste des ajustements à opérer et nous sommes bien conscients de la nécessité d'augmenter l'audience pour ce qui est de la partie télévisuelle.

J'ai envie que Radio France en fasse un peu plus. Nos équipes ont les savoir-faire et les compétences nécessaires. Leur apport pour la matinale est déjà substantiel et à la rentrée, leur présence en soirée sera renforcée. Telle est la volonté de Vincent Giret, qui a la lourde tâche de succéder à Laurent Guimier à la tête de Franceinfo. Ancien directeur de la rédaction de France24, il sera un très bon partenaire pour l'équipe de Franceinfo côté télévision.

Il est beaucoup question de « BBC à la française » – expression qui semble toujours plus chic que « RAI à la française » ou « RTVE à la française », pour ne prendre des exemples que dans des démocraties. Je vais être très clair : c'est pour moi exactement le chemin qu'il ne faut pas prendre. Bien sûr, nous avons besoin de coordination, bien sûr, nous avons besoin de renforcer nos synergies avec les autres opérateurs mais ce dont nous avons besoin avant tout, c'est d'agilité et de capacité de réaction. Face à Google, à Facebook et autres, nous avons tout sauf besoin d'une réforme de structure qui, dès lors qu'elle serait annoncée, gèlerait tout projet, chose qui ravirait nos concurrents.

Nous devons miser sur des petites structures qui cassent nos organisations en silos. C'est ce que nous avons commencé à faire avec le mode « projets » et avec Franceinfo. Je souhaite que nous lancions de nouvelles thématiques communes avec les autres acteurs de l'audiovisuel public, par exemple autour de la jeunesse ou des cultures urbaines, afin d'être des médias publics plus inclusifs. Nous avons déjà commencé avec Mouv' mais il faut aller plus loin.

Je crois aux forces de l'expérimentation. Nous pouvons imaginer des synergies entre France Bleu et France 3 autour de projets bien précis à l'échelon des régions. Nous envisageons également une collaboration entre France Culture et Arte autour d'une nouvelle offre fondée sur les savoirs, la connaissance et la culture.

L'État est notre actionnaire à tous. Il dispose d'un levier à travers les contrats d'objectifs et de moyens pour encourager de telles opérations. J'ai même proposé que dans le cadre d'une réforme de la contribution à l'audiovisuel public, les surplus de financement soient dédiés non au fonctionnement mais au financement des projets d'investissement communs.

Aujourd'hui, c'est vers une gouvernance plus souple et plus agile que nous devons nous diriger. Le temps de la BBC est révolu !

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